À l’approche de la succession de l’équipe dirigeante chinoise prévue en 2012, et alors que l’Occident développé est en proie à sa pire crise économique depuis les années 1930, la pression monte en Chine. China Analysis en a déjà rendu compte pour la politique extérieure, où 2010 a vu une affirmation sans précédents des thèses et des revendications chinoises. Remise sous contrôle par le sommet en décembre 2010, cette poussée se poursuit sous des formes moins bruyantes – avec l’essor de l’armée chinoise et un décollage des investissements à l’étranger.
Polémiques et débats se sont déplacés vers le terrain de la politique intérieure au début de l’année 2011 : les arrestations de voix critiques, sinon dissidentes, et de défenseurs des droits de l’homme, la systématisation envisagée de détentions au secret qui revient à une légalisation des enlèvements pour motifs politiques, ont retenu l’attention. Mais ici aussi le gouvernement chinois a fait retomber la pression, faisant sortir de prison, sinon d’une chape de surveillance policière, deux des trois critiques les plus connus de Chine – Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix 2010, demeurant en prison. L’essor massif des nouveaux réseaux de communication sociale conduit à un jeu du chat et de souris entre les autorités et le public. Si les premières gagnent toujours, ce dernier allume à nouveau des débats, souvent fournis par le spectacle de l’actualité. Une multitude de débats éclatent, alors que les autorités s’emploient à éteindre ceux qui les inquiètent le plus.
La presse officielle et les revues spécialisées ne reflètent pas entièrement cette réalité, qui procède des nouveaux media électroniques et tient du feu de broussaille plutôt que de débats structurés. Deux thèmes émergent pourtant dans les publications écrites : l’un, sur l’internationalisation du yuan chinois et la position de la Chine face à la crise des pays industrialisés, a déjà été traité dans China Analysis.
L’autre apparaît ici en pleine lumière, avec notre dossier. Il s’agit notamment du compte-rendu de la table-ronde dite des Collines parfumées qui s’est tenue à l’été 2011 autour de deux voies chinoises alternatives. Chongqing contre Guangdong, ce n’est pas seulement un conflit d’ambition entre deux politiques – Bo Xilai et Wang Yang – qui passent tous deux pour être candidats à la direction chinoise, et qui mobilisent de façon visible leurs appuis au sommet : au point d’inciter le secrétaire
du Parti de Shanghai, Yu Zhengsheng, à promouvoir lui aussi son « modèle ».
Sommaire
– DOSSIER: CHONGQING OU CANTON: DEUX MODÈLES CHINOIS –
Chongqing et Guangdong: bras de fer entre deux modèles
Chongqing, modèle d’une nouvelle politique économique et sociale
Vu depuis Hong Kong, l’opportunisme de Bo Xilai ne paye pas
A propos du modèle de Chongqing et de l’avenir de la réforme judiciaire en Chine
– REPÈRES –
Une internationalisation incertaine du yuan
Crise en vue, comment sauver les PME?
Energie en Chine: les voies engourdies du charbon
Une Chine passée maîtresse dans l’évitement des crises militaires
La stratégie de l’intégration sélective au système international
– DÉCALAGE –
Hu Jintao se transforme-t-il en Hu Yaobang sur le tard?
Ont contribué à ce numéro : Martina Bassan, Jean-Pierre Cabestan, Yang Chan, Gong Cheng, Jérôme Doyon, François Godement, Romain Lafarguette, Rozinisa, Marie-Hélène Schwoob, Charlotte Juan Wu