Ce numéro de rentrée de China Analysis précède d’un mois l’ouverture du 17ème Congrès du PCC. L’événement est ritualisé et presque vidé de son sens par la tornade d’une économie chinoise dépassant 11 % de croissance annuelle et enregistrant sans doute plus de 300 milliards de dollars d’excédent commercial en 2007. Pourtant, il donne lieu à la fois à des spéculations, mais aussi des positionnements révélateurs des débats et des enjeux de la direction chinoise. De façon fascinante, toutes les hésitations se concluent par le rappel du pouvoir d’arbitrage de Hu Jintao : celui qui a remis à l’honneur la direction collective et inauguré une transparence au moins formelle des instances dirigeantes est plus que jamais yibashou, le n° 1, et une véritable boîte noire en matière d’intentions.
China Analysis revient sur plusieurs aspects : la renaissance d’un débat poli, mais important par sa centralité, sur la démocratie politique. Et au moment où nous mettons sous presse, Xuexi (Study) publie à nouveau un éloge de la transformation démocratique, complément inéluctable de l’économie de marché, tandis que Drapeau Rouge fait savoir son opposition et que le Quotidien du Peuple émet des réserves. Il y a loin encore, il est vrai, entre la réactivité et la responsabilité prônées par le tandem Hu-Wen et des institutions démocratiques. La corruption (et les affaires de moeurs très publicisées) permet autant au Parti de justifier son autorité et son contrôle, qu’aux réformateurs d’appuyer un équilibre plus grand des pouvoirs. A elle seule, la publication officielle, des mois à l’avance, de la liste des délégués au 17ème Congrès constitue aussi pour ceux-ci une épreuve du feu – tant les risques de délation et de dénonciation publique sont grands. Des citadelles tombent : après le Parti shanghaien, c’est Sinopec, aujourd’hui une des dix plus grandes entreprises mondiales, dont l’influent patron est néanmoins débarqué en quelques jours, et le ministre des finances, interlocuteur des grands argentiers planétaires. La main de fer de Hu Jintao impressionne parce qu’elle combine stabilité et mouvement.
Ce numéro aborde aussi le thème de l’autorité centrale sous plusieurs autres aspects : pourquoi la gestion des fonds sociaux doit être centralisée ? Pourquoi l’armée ne doit pas être libéralisée au nom de sa modernisation ? Comment promouvoir les marques chinoises ?
L’autre Chine – Taiwan – n’est pas négligée. China Analysis n’a pas commenté la double offensive du référendum sur l’entrée à l’ONU (car le président Chen Shui-bian et le Kuomintang ont désormais chacun leur proposition). Le tout récent jugement lapidaire de l’ex-président Lee Teng-hui, selon lequel cette question aboutit à faire éclater la vie politique de l’île, est sans doute le meilleur commentaire. Nos choix se sont plutôt portés sur la question de l’espace international dévolu à Taiwan, en rétrécissement constant ; mais aussi sur l’hypothèse d’un arrimage de facto de Taiwan aux alliances que tisse le Japon en Asie-Pacifique, et aux mécanismes d’intégration régionale.
Enfin, ce numéro marque l’arrivée à la rédaction de Mathieu Duchâtel, doctorant sur les questions internationales et stratégiques chinoises, collaborateur constant de China Analysis depuis le premier numéro.
Sommaire
– POLITIQUE INTERIEURE –
Le débat démocratique n’est plus étouffé
Pour une opinion publique « guidée » en Chine
Remaniements au sommet en préparations du 17ème Comité Central
La préfecture, « belle-mère » dont on ne se débarrasse pas facilement
– ECONOMIE –
Sécurité sociale et retraites chinoises : l’Etat garde les commandes
Comment hisser les marques chinoises au rang mondial ?
– AFFAIRES DIPLOMATIQUES & STRATEGIQUES –
Contre le « changement pacifique » dans l’armée
Le rapport annuel du Pentagone : un débat sur les intentions et les moyens
Poutine le provocateur
– PRESSE TAIWANAISE –
La politique de suppression de l’espace international de Taiwan peut-elle s’assouplir ?
La déclaration conjointe nippo-australienne est-elle une bonne nouvelle ?
Ont contribué à ce numéro : Michaïl Andrei, Mathieu Duchâtel, François Godement, Hubert Kilian, Michal Meidan, Thibaud Voïta