Bertrand Badie
Article introductif au 6ème numéro de la revue Asia trends consacré à la thématique “Guerre & Paix”
“Dans la perspective de grande réorientation des questions géopolitiques vers un centre de gravité asiatique, il nous est apparu que non seulement les situations conflictuelle ou pré-conflictuelles du Continent devaient retenir notre attention, mais aussi que ces configurations interrogeaient aussi notre conception même de la « paix » et de la « guerre ». A ce titre, et dans l’idée de rassembler très vite les textes déjà élaborés ou en voie d’écriture dans un nouveau numéro de notre revue semestrielle, nous avons sollicité le Professeur Bertrand Badie, qui a bien voulu nous livrer ce texte introductif, prélude à notre prochaine publication complète. Nous l’en remercions, ainsi que les auteurs des textes qui suivront ici même.” – Jean-François Di Meglio, Président d’Asia Centre
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La guerre a profondément changé de nature, partout dans le monde, suite à la décolonisation et sous les effets conjugués de la mondialisation (1). On peut même s’interroger sur la pertinence du mot lui-même, tant il renvoie à une mémoire aujourd’hui décalée par rapport à la réalité sur le terrain : parler simplement de « nouveaux conflits internationaux » (NCI) semble plus pertinent, moins sujet à confusions. Ces NCI accumulent en effet les particularités : ils sont davantage intra-étatiques qu’extra-étatiques ; ils ne confèrent plus aux Etats le monopole des activités martiales prises en charge également par des « fronts », des « groupes armés » ou des «entrepreneurs de violence » ; ils substituent souvent les référents identitaires à l’idée sacro-sainte d’intérêt national ; ils ont recours à une gamme large et diversifiée d’instruments de combat. Plus généralement, ils s’inscrivent davantage dans la « tectonique des sociétés » que dans la rivalité de puissance, mettant en évidence la faiblesse belligène des premières et l’inefficacité croissante de la seconde (2).
Autant dire que ces conflits perdent en netteté et que la frontière entre la guerre et la paix paraît partout de plus en plus floue : on ne se soucie plus d’ailleurs de « déclarer la guerre » ni d’entamer des pourparlers de paix, on use d’un vocabulaire ambigu, on menace sans même savoir décrire la substance de ce qui risque d’arriver. L’Asie ne fait pas exception à la règle, mais elle a empiriquement inventé, par son histoire longue et son cheminement récent, « une exception dans l’exception ». Elle partage les mêmes incertitudes universelles car bien des tensions qui l’assaillent ne relèvent ni de la guerre stricto sensu, ni de son contraire : où classera-t-on les insurrections naxalites, au Bihar ou en Andhra Pradesh, ou encore les multiples séparatismes, assez déstabilisateurs pour menacer la paix, mais dont l’intensité est trop basse pour qu’on puisse parler de guerre, à l’instar de ce qu’on observe en Assam, en Irian-Jaya ou à Ambon ? D’ailleurs, distingue-t-on toujours à bon escient les « séparatismes » réels et les simples « affrontements religieux », comme précisément à Ambon où s’opposent chrétiens et musulmans? On est en réalité plus proche de ces « pathologies sociales durkheimiennes » que les interdépendances multiples, liées à la mondialisation, érigent, au gré des circonstances et des intérêts politico-diplomatiques, en faits internationaux (3).
Au-delà de ce flou quasiment stratégique, commun à l’ensemble de la planète, l’Asie sait se singulariser : à une confluence toute particulière de facteurs belligènes très variés, elle ajoute l’invention d’une forme largement inédite de règlement ou d’endiguement des conflits. Ni espace chaotique, ni pré carré institutionnalisé, ce monde extrême oriental aurait a priori bien plus de raisons que le Moyen-Orient voisin ou l’Afrique plus lointaine d’exploser dans d’effrayants cataclysmes : entre guerre froide et paix chaude, il tend pourtant à reproduire, du moins jusqu’à aujourd’hui, une forme d’équilibre qui pourrait préfigurer un mode original de paix utile pour le monde entier. Est-ce une formule nouvelle qu’une fois de plus l’Occident répugnera à considérer comme un exemple à suivre, nouvelle exception à sa prétention à tout savoir et à évangéliser les autres ?
Une réalité conflictuelle composite
L’Asie n’est pas westphalienne, mais elle a été « westphalianisée », éprouvant les effets d’une domination occidentale qui s’affirme dès le XIXéme siècle ; elle fut conduite, dans ce sillage, à s’aligner de gré ou de force sur les mœurs politiques et diplomatiques venues du monde westphalien : impact complexe et multiforme donc, puisque le monde asiatique eut à subir–et subit encore- des facteurs belligènes propres à son passé impérial pré-westphalien , d’autres issus du choc colonial, puis les perturbations liées à son insertion remarquable dans le jeu international dominant, dans la guerre froide et la bipolarité américano-soviétique, avant d’endurer enfin les effets scabreux de sa conversion tardive au prêt à porter stato-national. L’entrecroisement de ces quatre facteurs générateurs de conflits place donc cette partie du monde en position toute particulière, d’autant que, loin de s’annuler, tous ces effets se cumulent et se combinent selon un mode inédit, potentiellement dangereux.
Le poids du passé impérial dans le jeu conflictuel n’est pas aisé à évaluer. Les empires n’ont pas été marqués par cette irrépressible compétition de puissance qui fit l’ordinaire des Etats westphaliens, qu’en son temps Hobbes comparait à des gladiateurs (4). L’empire pèche davantage par expansionnisme que par goût de la rivalité. Circonstance apaisante, les empires asiatiques ne donnèrent jamais dans le messianisme, au contraire des empires occidentaux, ce qui évita bien des chocs possibles : l’ultra-nationalisme japonais s’éveilla davantage dans le contexte westphalien de Meiji qu’il ne fut inscrit dans sa tradition millénaire. La Chine elle-même ne se hasarda que très rarement à se lancer à la conquête de l’empire du soleil levant et Mao Zedong répétait volontiers qu’il ne fallait pas abusivement ressortir les contentieux sino-japonais issus des années trente… Circonstance aggravante, cependant, la proximité des trois empires (l’Inde ne l’étant que par la taille et très épisodiquement par l’histoire) évoque encore aujourd’hui ce qu’était l’Europe du XIXème siècle et ses évidentes tensions : comme celle-ci alors, l’Asie contemporaine vit dangereusement cette conversion de trois histoires impériales en macro-Etats jaloux de leur puissance régionale et crispés par leur promiscuité. Telles sont les racines du conflit sino-indien, tour à tour manifeste et latent depuis 1962, ou du conflit sino-japonais tout en croissance à mesure que l’Asie se « westphalianise », qui explose dans les années trente et qui se prolonge de façon plus étouffée aujourd’hui, se cristallisant notamment dans la mer de Chine, autour des iles Senkaku (Diaoyutai).
Mais il y a plus : le propre d’un empire est d’ignorer l’idée même de frontière, comme celle de territoire fini ; son espace n’a que des marges dont la légitimité reste incertaine et éternellement conflictuelle. Tibet ou Xinjiang, frontière ente Chine et Vietnam, ilots de la mer de Chine, « rayonnement » en Birmanie ou en Corée : trois millénaires d’histoire impériale chinoise ne s’abolissent pas d’un trait de plume, fût-il celui d’un droit international écrit en Occident. La même remarque vaudrait pour les rapports toujours tendus, voire conflictuels, entre le Japon et la Corée, ou pour les relations entre l’Inde et le Cachemire, voire le Pakistan ou le Sri-Lanka, sans compter ces centaines de milliers de musulmans de l’Assam, traités de « termites » par le ministre BJP de l’intérieur, Amit Shâh, et privés de leur nationalité : supériorités han, hindou ou nippone dérivent d’un imaginaire impérial plus ou moins forcé mais dont la charge conflictuelle s’exerce sans cesse davantage sur les minorités, sur des territoires rendus incertains et, de plus en plus, sur les flux migratoires tenus pour déstabilisateurs… Encore faudrait-il ajouter à ce trio la Russie qui offrit sa part de conflit avec le Japon, autour de la question de Sakhaline, mais surtout avec la Chine, à travers ce vieux contentieux potentiellement explosif qui fit l’histoire du fleuve Amour et donna notamment lieu au traité de Nertchinsk, en 1689, premier document qui permit à l’Empire du Milieu de mettre un doigt dans le système westphalien et un pied dans un conflit aujourd’hui âgé de plus de trois siècles. Destins impériaux qui, de surcroît, servent de socle à une volonté réelle, mais plus ou moins exprimée, de s’affirmer comme puissance régionale dominante au sein d’un marigot qui, compte tenu de la taille des uns et des autres, est finalement assez étroit.
Le choc colonial a très vite ajouté sa signature, semant, çà et là, mais durablement, ses propres germes de conflit. La domination occidentale apporta directement ses confrontations, à l’instar des deux guerres de l’opium, suivies de toutes les conquêtes coloniales qu’on connaît. Elle a surtout créé une culture nouvelle où se mêlèrent durablement une peur chronique et crispée de toute nouvelle ingérence venue de loin, un sentiment fort d’humiliation qu’il importait de compenser y compris par un recours à la force, une diplomatie susceptible et souvent menaçante, une peur panique des nouveaux encerclements. Mais cet impact ne se cantonnait pas dans le seul espace de l’imaginaire ni dans cette peur dont on sait qu’elle est déjà en soi belligène : elle s’est réalimentée constamment de vestiges directement issus des audaces coloniales tout aussi promptes à allumer des conflits sans fin. On a facilement en mémoire l’héritage conflictuel des concessions étrangères et leurs vicissitudes post-coloniales, celle de l’Allemagne dans le Shandong « offerte » au Japon par les diplomates versaillais, en forme d’étincelle dans les relations Tokyo-Pékin ; on a bien sûr à l’esprit l’impossible réintégration de Hong Kong dans l’empire chinois et les tensions qui en découlent aujourd’hui.
De même, la plupart des contentieux territoriaux – et des affrontements potentiels ou réels qui en dérivèrent- viennent des découpages qui suivirent, dès le XIX éme siècle, les appétits coloniaux. Le plus parlant concerne incontestablement le Sabah, jadis vassal relâché de la Chine, puis du sultanat de Sulu, et enfin de celui de Brunei, mais acheté en 1840 par le consul américain en poste dans ce dernier port, revendu ensuite à l’American Trading Company de Hong Kong qui s’en défait entre les mains du consul autrichien avant que, par désintérêt, le territoire ne soit abandonné à une compagnie britannique pour devenir colonie de la Couronne. Au moment des indépendances, Sabah fut « remis » à la Malaisie : cet aboutissement perçu alors comme banal suscita logiquement la rivalité entre au moins trois voisins, l’Indonésie qui lança la « konfrontasi » au nom de la géographie et de la continuité territoriale (rebondissant en 2002 à propos du bloc d’Ambalat), les Philippines, héritières du sultanat de Sulu, et la Malaisie dépositaire du « don » de l’ancienne colonie… (5) Ces manipulations coloniales furent, de la même manière, l’une des sources qui alimentent les conflits présents sur les iles Spratly (Chine/ Vietnam) ou Paracel (Chine/Vietnam/Philippines).
L’intégration de l’Asie dans la bipolarité mondiale et la guerre froide apparaît comme un troisième facteur constitutif de cette constellation conflictuelle. Elle vint d’abord durcir le trait de certains contentieux déjà explosifs : celui opposant Tokyo à Moscou, ou celui dressant la Chine contre le Japon à propos de Senkaku, l’archipel ayant transité par les Etats-Unis, avant que ceux-ci ne choisissent de le rendre à l’Empire du Soleil levant. De manière plus aigüe, les trois conflits les plus graves qui aient affecté récemment la région sont issus de cette importation du clivage Est-Ouest : celui concernant Taïwan a pris toute sa force dans sa mondialisation en pleine guerre froide, tandis que la guerre du Vietnam et celle de Corée furent directement le fruit de l’affrontement des deux camps. Plus profondément encore, l’inscription complexe de la région dans la rivalité des deux superpuissances aux prétentions universelles a eu un effet gravement amplificateur, donnant désormais un relief fort à des tensions limitées. Tout l’espace extrême- oriental a changé de nature, opposant d’abord un bloc régional, constitué autour d’une Chine communiste, à une puissance américaine de dimension mondiale. Cette asymétrie eut vite fait d’être dénoncée comme porteuse d’un nouvel impérialisme requalifiant les querelles déjà existantes, et impliquant une militarisation extrême de la région, les effectifs militaires américains en Asie orientale dépassant encore de nos jours les 50 000 hommes, tandis que le budget militaires chinois ne cesse d’augmenter…En outre, l’artifice de cet alignement devint la source banale de nouvelles conflictualités, opposant, dès les années soixante, Moscou à Pékin, avec les répercutions connues sur les rives du fleuve Amour qui s’enflammèrent en 1969, puis Pékin à ses alliés communistes de la région, et notamment au Vietnam, jusqu’à les conduire à l’affrontement en février-mars 1979. Mal à l’aise, voire marginalisée par le conflit est-ouest, la Chine essaya de relancer son rôle international en devenant le champion d’un conflit Nord-Sud qui l’amenait à jouer les protecteurs de la région, et à défier d’une nouvelle manière les Etats-Unis et le Japon…
Cette transformation, d’abord subie et ensuite provoquée, en rejoignait une autre, tout aussi belligène, jusqu’à se confondre souvent avec elle : la conversion forcée d’anciens ordres politiques, souvent colonisés, en Etats-nations suscita tout un ensemble de nouveaux conflits portés par des minorités opprimées ou mal intégrées à cette nouvelle configuration politique, souvent manipulées par les puissances régionales ou internationales afin de servir d’autres intérêts stratégiques. Ainsi en fut-il de la Birmanie qui fit face à de nombreux mouvements séparatistes, mobilisant les Karen, Kachin ou Shan et entretenant un climat de guerre qui ne laissa pas indifférents les acteurs extérieurs : la Grande Bretagne soutint activement les Karen, du moins au début de leur mobilisation, tandis que les Kachin furent ,au départ, aidés par les forces anti-communistes de Taïwan et de Corée du Sud avant d’être armés par Pékin et appuyés par un Parti Communiste birman essentiellement composé de minorités ethniques ! Dans le contexte des dernières décennies, la nature explosive de ce type de conflit met de plus en plus en évidence le positionnement des communautés musulmanes. Soit à titre offensif, comme dans le cas des Philippines marquées par la montée du séparatisme musulman et les effets dévastateurs du combat mené par le groupe Abou Sayyaf depuis la fin du siècle dernier. Soit à titre subi, comme l’illustrent le cas des Rohingyas, entre Birmanie et Bengladesh, ou ceux des Musulmans en Assam ou du Sri Lanka.
Une paix complexe
Un tel tableau pourrait évoquer ce « chaos » dont parlent tant d’observateurs, comme pour démontrer que notre monde est de plus en plus désorganisé, tout en tournant résolument le dos aux sentiers de la paix. Outre que cette idée de désordre dramatique cède trop au sensationnel, oubliant l’œuvre ordonnée de logiques profondes qu’on refuse de voir en face, force est d’admettre que l’Asie orientale n’est plus aujourd’hui un de ces champs de bataille du monde, comme le sont le Moyen-Orient, l’Afrique sahélienne ou l’Afrique centrale. On peut, pour tenter de le comprendre, retourner notre questionnement et repérer les facteurs qui militent pour cette paix « chaude » qui n’efface nullement les lignes de conflit, mais les contient de manière somme toute assez efficace.
On peut songer d’abord aux facteurs déjà consacrés par la théorie dominante des relations internationales, et en tout premier lieu l’effectivité de la dissuasion. Les zones contemporaines de guerre s’éloignent géographiquement des espaces de puissance. Là où ceux-ci sont immédiatement visibles, les conflits dégénèrent rarement : une puissance régionale dissuasive ou solidement alliée à une puissance mondiale modère les pressions martiales. C’est là un paradoxe de notre temps : la dissuasion fonctionne, mais la projection ou l’intervention de puissance fait des dégâts considérables et dissuasifs sans réellement gagner lorsqu’elle se produit hors de ses bases. Un conflit impliquant directement la Chine ou la puissance américaine en Asie est encore perçu comme inutilement coûteux, au prix même de laisser filer des acteurs aussi turbulents que la Corée du Nord.
De même, aussi tourmentée fût-elle, l’entrée de l’Asie orientale dans le système international westphalien s’est révélée solide et bien plus que formelle, au contraire des régions les plus exposées aux guerres contemporaines : l’Extrême-Orient est devenu partie du centre du système international, et la Chine, tout comme le Japon fait partie des « connivents » dont il ne saurait être question de bousculer totalement les acquis (6). Chacun sait, à Pékin, qu’on n’est pas membre permanent du Conseil de Sécurité et partie des grandes négociations pour rien… Ce discret équilibre des pouvoirs vaut d’ailleurs aussi pour l’économie : dans un monde d’interdépendance, la destruction d’une économie forte n’est un cadeau pour personne ; pour chacun pris séparément, le coût d’une guerre frontale est évidemment trop élevé. Ce calcul cynique se fait en partie aux dépens de ceux, minorités ou petits Etats, qui comptaient sur le grand frère : autant de variables d’ajustement qui en sont pour leurs frais et risquent de précipiter les déçus vers des violences sans cesse radicalisées et plus effrayantes, comme le suggère la dénomination faussement rassurante de « paix chaude ». La tectonique des sociétés remplace alors le choc des Etats : on en avait déjà un avant-goût, dès la fin des années soixante-dix, avec l’effet stabilisateur des premières intégrations économiques transnationales, zones économiques spéciales ou triangles de croissance qui faisaient vivre en couples forcés bien des antagonistes politiques : c’était la magie efficiente des « territoires économiques naturels » (7).
Mais il y a plus profond et plus déterminant : les conflits d’aujourd’hui ne s’alimentent plus tant des rivalités de puissance, assez efficacement neutralisés, mais des logiques de faiblesse. Trois d’entre elles se révèlent particulièrement belligènes : celle touchant les Etats et leurs institutions, celle affectant les nations, celle viciant le lien social. Or, les Etats asiatiques gardent une force qui bloque l’émergence de dynamiques conflictuelles internes, sauf peut-être là où ils stagnent à un niveau trop bas d’institutionnalisation, comme en Birmanie, au Myanmar et dans les espaces reculés d’Indonésie. Les nations y connaissent, par l’histoire, une cohésion plus forte qu’ailleurs, ne laissant ainsi aux minorités que le choix d’un exil désespéré. Le lien social, quant à lui, a tiré profit, dans cette région du monde, d’une modernisation sociale non négligeable et d’une technologie développée qui s’avèrent être sources d’efficacité..
Entre des guerres westphaliennes trop coûteuses et des conflits post-westphaliens qui n’y trouvent pas leur ressort, l’Asie orientale n’est nullement un Eden, mais s’accomplit dans une transition- certes souvent douloureuse -qui abandonne la pression conflictuelle aux marges de chacune des sociétés. Voilà qui, du même coup, l’amène, Chine en tête, à repenser des formes nouvelles et plus efficaces de domination, au-delà d’une hégémonie classique, « à l’américaine », hier tenue pour une optimisation de la puissance, aujourd’hui perçue comme faiblement gagnante.
(1) Kaldor, Mary, New and old wars: Organized Violence in a Global Era, Stanford, Stanford University Press, 2012 (3éme édition); Münkler, Herfried, The New wars, Cambridge, Polity Press, 2004.
(2) Badie, Bertrand, Quand la Sud réinvente le monde. Essai sur la puissance de la faiblesse, Paris, La Découverte, 2018.
(3) Ibid.
(4) Hobbes, Thomas, Le Leviathan, Paris, Sirey, 1971 [1651].
(5) Jones, Matthew, Conflict and Confrontation in South East Asia, 1961–1965: Britain, the United States and the Creation of Malaysia. Cambridge: Cambridge University Press, 2009.
(6) Badie, Bertrand, La Diplomatie de connivence, Paris, La Découverte, 2011.
(7) Scalapino, Robert, The State of International Relations in Northeast Asia , Asia Policy , No. 3 janvier 2007, pp. 25-28.