Par Maëlle Lefèvre et Camille Schischmanoff, chargées de recherche à Asia Centre.
Résumé
Après sept années de négociations, la signature d’un accord de principe sur les investissements entre l’Union Européenne et la Chine le 30 décembre 2020, le Comprehensive Agreement on Investments (CAI ou 中欧投资协定), constitue une étape non négligeable en faveur de relations économiques plus équitables que l’UE appelle de ses vœux, et notamment pour mettre un terme à une relation déséquilibrée qui a jusque-là bénéficié à la Chine. Le CAI a connu un accueil plus que mitigé, tant sur la scène internationale qu’au sein de l’UE, bien qu’annonçant des conditions d’échanges qui avantagent les acteurs européens dans la majorité des cas, contrastant alors avec un manque à gagner économique apparent du côté chinois.
Cette étude cherche à prendre en compte la nécessité économique d’un accord sur les investissements en revenant, dans une lecture critique des différentes sections et articles de l’accord, sur les éléments favorables à l’UE à l’issue des négociations, mais aussi le contexte géopolitique complexe dans lequel la signature du CAI s’inscrit.
Selon une approche économique, cette étude analyse dans une première partie (I) les avancées et les limites des conditions d’échanges favorables à l’UE obtenues à l’issue des négociations et une synthèse des changements à venir pour les opérateurs économiques européens. Répondant à une nécessité réelle de réduction des asymétries et d’encadrement des flux d’investissements, de nouvelles ouvertures sectorielles ponctuelles du marché chinois (pp. 9 à 11) mais surtout des conditions d’accès au marché moins discriminatoires en faveur de plus de transparence et de sécurité (pp.11 à 14) vont dans le sens d’une amélioration sensible, bien qu’imparfaite, de l’équilibre des relations. La présence d’une section dédiée au développement durable, étonnante dans un accord de ce type, semble avoir en revanche une portée plus symbolique que pratiquement effective (pp. 14 à 16), mais fournit cependant quelques instruments à l’UE pour demander des comptes à Pékin sur ces sujets sensibles. D’autre part, des failles (processus de règlement des différends) ou des absences (mécanisme de protection des investissements) dans le texte du CAI peuvent fragiliser sa portée et son application (pp. 16 à 19) et semblent être le résultat d’une précipitation dans la clôture des négociations.
Puis, dans un second temps (II), est proposée une analyse du contexte géopolitique dans lequel la signature du CAI s’inscrit ainsi qu’une étude comparative des gains géopolitiques respectifs côté européen comme côté chinois. Le manque à gagner pour Pékin est remis en perspective afin de caractériser les avantages économiques (pp. 19 à 21) mais aussi géopolitiques que tirerait la Chine du CAI, dans un moment qui lui est particulièrement favorable à la veille de l’entrée en fonction du nouveau président américain (pp. 21 à 24) après une année 2020 particulièrement tendue entre la Chine et l’Occident sur un certain nombre de dossiers. Le CAI ne représente pas nécessairement une défaite pour l’UE puisque cet accord s’inscrit dans une stratégie affirmation plus globale d’autonomie vis-à-vis de Washington et qui assume pragmatiquement une approche économique réaliste par rapport à la Chine, mais les conséquences géopolitiques afférentes à la signature de l’accord de principe révèlent toutefois les fragilités, sinon les faiblesses, de la nouvelle politique de l’UE, qui tâtonne encore pour définir une vision géopolitique forte et cohérente sur le long terme (pp. 24 à 32). Cependant, il est rappelé qu’un accord sur les investissements n’est pas un accord commercial et, comme tout accord international, il traduit un point d’équilibre entre les négociateurs – et donc imparfait par nature – qui n’a pas vocation à résumer la totalité et la complexité des relations sino-européennes dans leur ensemble.
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